Par Badé SECK et Bocar SAKHO – Au lendemain de la rentrée des classes, le ministre de l’Education nationale fait le point sur la situation de l’école : recrutement de nouveaux enseignants et d’inspecteurs, les nouvelles tenues scolaires, les activités d’incivisme à l’école. Mamadou Talla passe au tableau.
M. le ministre, les enseignants ont repris le chemin de l’école ce 11 octobre. Pouvez-vous nous dire si le démarrage des cours est effectif dès ce jeudi ?
Depuis trois ans, nous nous employons à réaliser un démarrage effectif des enseignements-apprentissages dès le premier jour de la rentrée. Les années passées nous n’avons jamais eu moins de 87% d’enseignants présents. Cette année aussi, nous avons fait le point au niveau des inspections d’Académie et véritablement nous sommes rassurés. Hormis quelques rares enseignants déclarés malades, plus de 90 % de l’effectif sont déjà au poste. Je voudrais d’ailleurs profiter de l’opportunité pour féliciter et encourager tout le personnel de l’éducation : les enseignants, pour leur sens élevé de la responsabilité, les élèves, les surveillants, le personnel administratif jusqu’aux gardiens des écoles. Je remercie aussi l’ensemble des associations de parents d’élèves, les mouvements de jeunesse, tous les partenaires, les collectivités territoriales, les autorités administratives qui ont tenu des Crd spéciaux, des Cdd et des Cld consacrés à la rentrée. J’en profite également pour dire aux parents et élèves que l’administration est déjà en place depuis le 11 octobre et que toutes les dispositions seront prises pour démarrer les enseignements-apprentissages.
Par ailleurs, le lancement de la 21ème édition de la Semaine nationale de la propreté de l’école (vendredi 8 octobre 2021), à l’école élémentaire Stade Sud de la commune de Thiès, a aussi marqué le démarrage des activités de nettoiement des écoles publiques élémentaires pour la rentrée scolaire 2021-2022. La manifestation s’est déroulée dans un contexte de renforcement de la collaboration entre le ministère de l’Education nationale et le celui en charge de l’Urbanisme qui, à travers l’Unité de coordination de la gestion des déchets solides (Ucg), a appuyé ces actions de nettoiement dans nos écoles à la veille de chaque ouverture des classes. Ces initiatives font suite à la directive du président de la République d’œuvrer à des écoles vertes, propres et accueillantes, en somme à un cadre de vie attrayant.
De plus, comme vous le savez, le lancement de la Semaine nationale de la propreté de l’école intervient dans un double contexte marqué, d’une part, par la crise sanitaire mondiale avec le Covid-19 et ses effets dévastateurs à l’échelle de la planète terre, et, d’autre part, par l’option réaffirmée au plus haut niveau de l’Etat, par le président de la République, d’une prise en charge résolue des questions liées au cadre de vie, à la propreté et à l’hygiène publique. C’est à ce titre que le chef de l’Etat a insisté pour qu’une attention particulière soit accordée à l’amélioration de l’environnement scolaire, afin d’offrir à nos enfants, des conditions d’apprentissage propices à leur épanouissement et à leur réussite.
Vous venez de l’évoquer, évidemment, le Covid-19 est toujours là même si la tendance baissière continue. Le protocole sanitaire sera-t-il aussi maintenu cette année ?
Effectivement, la présente année scolaire se tient dans un contexte encore marqué par la pandémie du Covid-19 qui nécessite la mobilisation de tous, pour le respect scrupuleux du protocole sanitaire édicté par les autorités compétentes. Le Comité national de la gestion des épidémies a ordonné de reconduire le même protocole que l’année dernière et qui recommande le port obligatoire du masque, la mise à disposition du gel hydro-alcoolique, la distanciation physique et le lavage des mains. Cependant, quelques mesures spécifiques ont été apportées à ce protocole, notamment les Tests de diagnostic rapide (Tdr). Nous allons installer dans les infirmeries scolaires et dans les inspections médicales des écoles, des dispositifs pour l’utilisation des Tdr. Concernant les écoles qui ne disposent pas de structures médicales, les cas suspects seront référés dans les cases et postes de santé les plus proches, pour leur prise en charge. Nous allons aussi mettre en place une stratégie de vaccination.
Justement, la vaccination est-elle une obligation pour le personnel enseignant ?
Je tiens à rappeler que la vaccination est personnelle et volontaire, mais je ne doute point que les enseignants ne soient pas vaccinés. Beaucoup d’entre eux se sont fait vacciner et ont été les premiers à le faire d’ailleurs.
Quel le bilan tirez-vous de l’année scolaire écoulée ?
Malgré les contraintes liées à cette pandémie, je voudrais magnifier la grande capacité de résilience de notre système éducatif comme en attestent les résultats satisfaisants notés aux différents examens scolaires cette année encore. En effet, nous avons réalisé un taux de réussite de 62,14 % au Cfee, 67,96 % au Bfem et 44,65% au Baccalauréat général.
Aussi, j’adresse mes félicitations et encouragements à toute la communauté éducative, en général, aux personnels enseignants et leurs organisations représentatives, en particulier. Il nous faut reconsidérer nos méthodes et nos stratégies d’actions de l’année dernière, à tous les niveaux, et identifier les mesures efficaces en vue de consolider les acquis au service exclusif de l’apprenant. Nous tenons aussi à remercier, au nom du gouvernement, les partenaires de l’Education, par leur apport constant et multiforme qui contribue à la réalisation de la politique éducative de notre pays.
Il est important de relever aussi plusieurs avancées du secteur, notamment le recrutement de 5000 enseignants, en plus du recrutement annuel pour pallier le déficit en personnel ; l’érection de la Maison d’Education Mariama Ba en Lycée d’excellence, en plus de la construction déjà entamée de 2 Lycées d’intégration nationale pour la qualité et l’équité (Lineq) à Sédhiou et Kaffrine ; le déploiement du Projet du ministère de l’Education pour le développement du téléenseignement (Promet) afin de proposer une nouvelle offre éducative adaptée à cette nouvelle génération ; la décision présidentielle d’installation des Classes préparatoires aux grandes écoles à partir de cette année scolaire ; la reprise du monitoring par le gouvernement, pour une meilleure prise en charge et un suivi des accords avec les syndicats du G7. En plus de tous ces acquis, nous devrons être prêts à mener d’autres combats et poser des jalons afin que le système éducatif devienne chaque jour, davantage plus efficace et les acteurs (élèves et enseignants), dans de meilleures conditions d’enseignement- apprentissage.
La problématique des abris provisoires est toujours d’actualité, quelles sont les stratégies mises en place pour parvenir à leur résorption ?
Le chef de l’Etat, dans sa volonté d’offrir à l’ensemble des élèves du Sénégal un cadre d’apprentissage approprié, a décidé de la mise en œuvre d’un programme national de suppression de l’ensemble des abris provisoires. Présentement, après la réception des deux premiers lots, nous avons démarré la construction du lot 3, pour un montant de 33 milliards, afin de résorber le déficit de 1528 salles de classe, dans le moyen, compléter les ouvrages annexes (1129 blocs administratifs et 602 blocs d’hygiène) dans tous les ordres d’enseignement et clôturer avec 58 000 mètres linéaires, certains collèges et lycées.
Du côté du personnel, est-ce que cette année des efforts sont faits pour résorber le déficit d’enseignants ?
Nous sommes en train d’œuvrer pour résorber ce déficit. Rien que pour cette année, nous avons procédé au recrutement de 8700 enseignants dont 2500 pour le Préscolaire et l’Elémentaire (2000 pour l’enseignement en français et 500 pour l’enseignement en arabe) et 1200 pour le Moyen et le Secondaire général. A ceux-là s’ajoutent les 5000 autres recrutés à titre exceptionnel parmi lesquels 3650 seront affectés à l’Elémentaire.
Ces 2500 enseignants, sortants des centres régionaux de formation, ont déjà fini leur formation. Ils recevront leur ordre de service sous peu, de même que les sortants de la Fastef, de l’Ensept et de l’Ufr Gaston Berger. Comme vous le savez, l’enseignant a besoin d’une formation de qualité et d’un suivi encadrement. C’est pourquoi, cette année, nous avons initié un recrutement de 41 Inspecteurs de l’Enseignement moyen-secondaire (Iems).
Justement, à ce propos, les cinq mille enseignants recrutés exceptionnellement dans le cadre du Programme Xeyu Ndaw gni sont-ils déjà opérationnels ?
Effectivement, le recrutement est fait selon un processus et sur la base de critères bien déterminés. L’objectif est que ces enseignants soient opérationnels cette année pour combler le déficit en personnel enseignant. Il faut souligner que ceux-là qui sont recrutés sur la base d’un diplôme professionnel sont au nombre de 2000, et n’ont pas besoin d’être formés car ils sont déjà prêts à prendre service. La Direction des ressources humaines est en train de s’affairer à leur affectation. Par contre, les 3000 autres élèves-maîtres sont en formation dans les différents Centres régionaux de formation des personnels de l’Education (Crfpe) et termineront leur formation en fin octobre.
Depuis quelques jours, il y a la grogne des enseignants des classes passerelles, quel est le fond du problème ?
Tout à fait, lorsque nous avons eu écho de leur grogne, nous les avons appelés pour discuter et échanger avec eux. J’avais donné des instructions au directeur des Ressources humaines du ministère de les rencontrer afin de trouver une solution.
Ceux qui sont dans le système «passerelles» ont des bonus qui leur ont permis d’être recrutés. Par ailleurs, 78 parmi eux ont été recrutés.
A la fin de l’année scolaire, on a constaté des challenges des élèves dans certains établissements montrant des actes de violence et d’incivisme. Que faire pour éviter des pratiques de ce genre ?
En effet, malheureusement, la fin de l’année scolaire a été marquée dans quelques endroits par des actes de violence et d’incivisme. Cela nous interpelle tous. C’est dans ce sens que le président de la République a donné des instructions aux ministres en charge de l’Education, à faire respecter, à tous les niveaux d’autorité, les règlements disciplinaires qui régissent la vie de l’Ecole, car, je le cite : «Il y va de la sauvegarde de notre bien commun et de l’avenir de la Nation.»
Dans ce même sillage, de façon consensuelle, l’édition de cette année de la Journée mondiale de l’Enseignant, célébrée le 5 octobre dernier, a eu pour thème : «La restauration de l’Education aux valeurs et à la citoyenneté : quelles stratégies ?» Au-delà des mesures prises pour une gestion de cette question par l’autorité, la réflexion à mener autour de cette interrogation nous interpelle tous. Comme vous le savez, l’Ecole, de par sa mission de transmission des savoirs et savoir-faire, est également l’espace privilégié de construction de la citoyenneté, de la volonté de vivre en commun, d’apprentissage du respect de l’autre, de la tolérance, des règles de la vie démocratique, en un mot du savoir-être. Il est de la volonté de l’ensemble des acteurs dont les parents, de faire en sorte que l’Ecole soit et demeure exclusivement un sanctuaire et un temple du savoir. C’est ainsi que nous pourrons garantir les performances dans notre secteur, à travers un encadrement approprié de nos élèves et une discipline constante dans nos établissements.
Le G7 demande toujours le respect du protocole d’accord… Peut-on espérer une année scolaire apaisée ?
Concernant l’apaisement du climat social, j’en ai fait d’ailleurs une de mes premières priorités pour le quinquennat, à savoir promouvoir un climat social apaisé dans le secteur.
Je tiens à rappeler, récemment, la reprise du monitoring par le gouvernement, pour une meilleure prise en charge et un suivi des accords avec les syndicats du G7. J’ai pris l’engagement, et je l’ai réaffirmé la semaine dernière à Saly, lors du séminaire sur la rentrée scolaire, que je ne ménagerai aucun effort pour la satisfaction de tous les points inscrits sur la plateforme revendicative afin que le système éducatif devienne chaque jour davantage plus efficace, et les acteurs, dans de meilleures conditions d’enseignements-apprentissages.
Une grande mesure a été annoncée concernant la confection de tenues scolaires. Quelles sont les dispositions déjà prises en ce sens ?
Vous savez, c’est une mesure extrêmement importante du président de la République qui a demandé, dans le Préscolaire comme dans l’Elémentaire, que l’on puisse donner deux tenues à chaque élève. Les préalables concernant la stratégie, les études, le nombre d’élèves et les couleurs ont déjà été déterminés par le ministère. La commande est faite au niveau du ministère de l’Artisanat et la Der, de concert avec ledit ministère, a déjà octroyé le financement aux chambres de métiers chargées de confectionner ces tenues.
Au vu de l’importance des effectifs à couvrir, il s’agira de se procurer plus de 6 millions de mètres de tissu, ce qui est considérable. Mais nous sommes en train de voir avec les tailleurs, dans les régions et dans les départements, pour que l’on puisse disposer de ces tenues dans les meilleurs délais. De plus, il faut rappeler que c’est une enveloppe de 10 milliards qui sera octroyée chaque année, pendant trois ans, pour que la mesure soit effective dans notre pays. L’initiative permettra de soulager les parents et, les collectivités territoriales seront mises à contribution, dans les années à venir, afin de pérenniser la mise à disposition de tenues scolaires pour les élèves du Sénégal.
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